Le délit d’entrave à la mise en place du CSE
Le délit d’entrave à la mise en place du CSE peut se matérialiser par une entrave au droit d’élire ou d’être élu, mais également par l’absence d’organisation des élections.
A titre d’exemple, commet un délit d’entrave :
- l'employeur qui ne prend pas les mesures appropriées pour le renouvellement des instances et qui ne convoque pas les organisations syndicales à négocier le protocole électoral dans les délais impartis, et qui ne justifie aucune impossibilité de tenir les élections. (Cass. crim., 6 novembre 2007, no 06-86.027)
- l'employeur qui refuse d'organiser l'élection des représentants du personnel bien que l'effectif pour leur mise en place soit atteint et malgré de nombreux rappels de ses responsabilités (Cass. crim., 15 mai 2007, no 06-86.896)
- l'attitude de l'employeur qui cherche à influencer le résultat du vote en demandant par une note de service aux salariés de s'abstenir de voter au premier tour (Cass. crim., 20 mars 1979, no 78-92.967)
Le délit d’entrave au fonctionnement du CSE
Le délit d’entrave au fonctionnement régulier du CSE se matérialise notamment par le fait d’empêcher les membres de se réunir, de refuser de communiquer des informations obligatoires au comité, ou encore le fait d’empêcher les membres de circuler librement dans l’entreprise.
Illustrations jurisprudentielles où il a été retenu que l’employeur commet un délit d’entrave :
- l'employeur qui néglige volontairement de convier les représentants du personnel à une réunion obligatoire. (Cass. crim., 27 février 2018, n° 17-81.457)
- le chef d'établissement qui refuse d'organiser une réunion extraordinaire du comité demandée par la majorité de ses membres (Cass. crim., 11 mars 2008, n° 07-80.169)
- l'employeur qui, à cinq reprises, au cours de la même année, désigne pour le représenter aux réunions du comité, des salariés qui n'avaient ni pouvoir, ni qualité pour informer et consulter cette instance (Cass. crim., 20 février 1996, no 94-85.863)
- l'employeur qui n'a pas mis en place le panneau d'affichage réservé aux communications syndicales (Cass. crim., 20 mai 2008, no 06-86.580)
- l'employeur qui refuse de fournir un local au comité et le matériel de fonctionnement suffisant (Cass. crim., 15 mai 2007, no 06-84.318)
Le délit d’entrave aux missions du CSE
Le délit d’entrave peut également être constitué s’il apparaît que l’employeur ne permet pas le bon exercice des attributions du CSE.
Par exemple, constitue un délit d’entrave la consultation du CSE qui n’apparaît que fictive (Cass. crim., 30 octobre 2018, n° 17-87.260).
Ainsi, dans le cadre des consultations du CSE, le défaut d’information ou tout simplement l’absence de consultation constitue un délit d’entrave.
Par exemple, constitue un délit d’entrave :
- la décision par l'employeur, sans consultation préalable du comité, de restructurer un service, ce qui affecte les conditions de travail d'un nombre important de salariés (Cass. soc., 21 novembre 2012, no 11.10.625)
- le défaut de consultation préalable du comité avant de refuser l'octroi d'un congé individuel de formation (Cass. crim., 4 janvier 1983, no 82-91.800)
Également, le délit d’entrave peut être caractérisé dans le cadre de la gestion des activités sociales et culturelles du CSE. En effet, le CSE a le monopole des activités sociales et culturelles. L’employeur qui enlève au comité la gestion de certaines activités pour les gérer lui-même, sans l’accord du comité, peut être poursuivi pour délit d’entrave. De même, le refus par l'employeur de verser le budget « ASC » constitue un délit d’entrave (Cass. crim., 10 mars 1992, no 91-81.177).
L’atteinte au statut protecteur des membres du CSE : un délit d’entrave
Enfin, le délit d’entrave peut être caractérisé lorsque l’employeur porte atteinte au statut protecteur des membres du CSE. Une telle atteinte peut entraver le fonctionnement régulier
du comité. La Cour de cassation a retenu le délit d’entrave lorsque l’employeur ne respecte pas la procédure de licenciement d’un salarié protégé.
Par exemple, commets un délit d’entrave :
- l'employeur qui omet de suivre la procédure propre aux représentants du personnel et licencie sans autorisation administrative (Cass. crim., 3 mai 1979, no 77-92.852)
- l'employeur qui procède au licenciement d'un salarié protégé après annulation d'un refus d'autorisation de l'inspecteur du travail : en effet, l'annulation ne vaut pas autorisation de licenciement (Cass. crim., 5 déc. 1989, no 89-82.031)
Il en va de même lorsque l’employeur décide de modifier, unilatéralement et sans l’accord du salarié protégé, son contrat de travail.
Par exemple :
- le fait d'imposer une mutation aux représentants du personnel contre leur volonté est considéré comme un délit d'entrave (Cass. crim., 9 nov. 1982, no 81-94.802)
- le fait de faire délibérément obstacle au reclassement d'un salarié protégé déclaré inapte par le médecin du travail caractérise un délit d'entrave (Cass. crim., 26 oct. 2010, no 09-87.671).
Comment caractériser en pratique le délit d’entrave ?
Le délit d’entrave pour être retenu doit être caractérisé, comme tout délit, par 3 éléments constitutifs :
- L’élément légal : il correspond à la méconnaissance d’une disposition légale ou conventionnelle.
- L’élément matériel : il correspond au comportement interdit par les textes.
- L’élément intentionnel : Pour être passible d’une sanction pénale, il est nécessaire de prouver que la personne avait la volonté d’accomplir l’acte prohibé. En matière de délit d’entrave, l’élément moral n’a pas à être prouvé en lui-même, mais est présumé à partir de la constatation de l’élément matériel, le juge considérant que le fait d’avoir accompli un tel acte impliquait une intention coupable.
Vous souhaite en apprendre davantage à ce sujet ?
Contactez-nous !Quelles sont les sanctions encourues pour délit d’entrave ?
La sanction diffère en fonction du type de délit d’entrave : la mise en place du CSE ou son bon fonctionnement
- L’entrave au bon fonctionnement du CSE est punie d’une peine d’amende de 7 500 €.
- L’entrave à la mise en place du CSE est punie d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 7 500 €.
Par ailleurs, au-delà des sanctions pénales, des sanctions civiles peuvent être encourues. En effet, si le CSE ou un membre du comité estime subir un préjudice, il peut agir afin d’obtenir des dommages et intérêts.
Bien souvent c’est l’employeur ou son représentant qui se rends coupable d’un délit d’entrave. Toutefois, la Cour de cassation a parfois caractérisé le délit d’entrave à l’égard d’autres personnes :
- le repreneur de l'entreprise qui refuse de conserver un salarié protégé irrégulièrement congédié (Cass. crim., 30 mai 1995, n° 94-80.355)
- un salarié qui s'est opposé à la réintégration, d'un délégué syndical irrégulièrement licencié (Cass. crim., 9 déc. 1986, n° 86-90.552)
- un membre de l'institution représentative (secrétaire du CE) qui engage une dépense ayant été soumise au vote du comité mais non approuvée par la majorité de ses membres (Cass. crim., 4 nov. 1988, n° 87-91.705)
Recevez toute l'actualité juridique !