Selon DALLOZ « L'inaptitude est l'état dans lequel se trouve le salarié, victime d'un accident ou d'une maladie, d'origine professionnelle ou non, quand il n'est pas en mesure de reprendre l'emploi qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail provoquée par cet accident ou cette maladie ».

C’est le médecin du travail qui déclare le salarié inapte.

Il existe deux grandes catégories d’inaptitude : 

  • L’inaptitude d’origine professionnelle, elle est prononcée à la suite d’un accident du travail ou une maladie professionnelle.

  • L’inaptitude d’origine non-professionnelle, elle est prononcée à la suite d’un accident de la vie ou une maladie qui relève de la vie privée du salarié.

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler le concept de l’inaptitude partiellement professionnelle : « Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement » (Cass. soc., 7 mai 2024, nº 22-10.905).

C’est un concept très intéressant qui mérite d’être expliqué puisqu’il emporte des conséquences importantes notamment en termes d’indemnisation du salarié (voir ci-dessous).

L’inaptitude partiellement professionnelle doit être prononcée lorsque 3 conditions sont réunies :

  • Première condition : Le salarié a été victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

  • Seconde condition : Il y a un lien de causalité entre l’inaptitude du salarié et l’accident du travail ou la maladie professionnelle, comme indiqué, même un lien de causalité PARTIEL suffit.

  • Troisième condition : L’employeur avait connaissance de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle au moment du licenciement pour inaptitude.

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Dans l’arrêt du 7 mai 2024, l’employeur a procédé à un licenciement pour inaptitude non-professionnel. Le salarié décide alors de saisir le juge pour contester cette décision et faire reconnaître l’origine professionnelle de son licenciement pour inaptitude. En effet, selon le salarié, son licenciement pour inaptitude est bien en lien avec son accident du travail survenu 3 ans avant.

Les faits d’espèce sont les suivants : un chauffeur poids lourds a été victime d’un accident du travail. Cet accident du travail a entraîné un premier arrêt allant du 18 avril 2002 au 25 décembre 2002. Ce premier arrêt précisait bien le lien avec l’accident du travail.

A l’issue de ce premier arrêt, le salarié n’a jamais repris son poste et a bénéficié d’arrêts de travail successifs qui, cette fois-ci, ne précisaient pas l’origine professionnelle des arrêts, contrairement au premier arrêt de travail. 

Le salarié n’a jamais cherché à faire reconnaître l’application, pour ses arrêts, de la législation sur l’accident du travail et la maladie professionnelle.

De son côté, le médecin du travail avait expressément indiqué que l’inaptitude avait pour origine une maladie ou un accident « non-professionnel ».

Mais, pour la Cour de cassation, l’inaptitude a bien une origine partiellement professionnelle. Par conséquent, l’employeur aurait dû licencier le salarié pour inaptitude professionnelle et appliquer toutes les règles attachées à ce licenciement.

Il est possible de reprendre les 3 conditions énumérées précédemment pour comprendre la décision de la Cour de cassation :

  • Première condition : Le salarié a été victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Le chauffeur a bien été victime d’un accident du travail, non contesté : la première condition est remplie.

  • Seconde condition : Il y a un lien de causalité entre l’inaptitude du salarié et l’accident du travail ou la maladie professionnelle, comme indiqué, même un lien de causalité PARTIEL suffit.

La Cour de cassation estime que le premier arrêt de travail étant bien d’origine professionnelle, le fait que les arrêts suivants soient non-professionnels n’ont pas d’importance. Le premier arrêt en lien avec l’accident du travail suffit à reconnaître un lien partiel de causalité entre l’inaptitude et l’accident du travail.

D’autant plus, qu’en l’espèce, entre l'accident du travail à l'origine du premier arrêt et la rupture du contrat de travail via le licenciement pour inaptitude, le salarié n'a jamais repris le travail, ce qui amplifie le lien de causalité.

Pour la Cour de cassation, il existe bien un lien de causalité au moins partiel du fait de l’existence d’un premier arrêt en lien avec l’accident du travail : la seconde condition est remplie.

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  • Troisième condition : L’employeur avait connaissance de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle au moment du licenciement du salarié.

La Cour de cassation relève que « l’employeur avait connaissance que l’accident du travail était à l’origine du premier arrêt de travail du salarié et que ce dernier n’avait jamais repris le travail depuis la date de l’accident du travail jusqu’à la rupture du contrat » : la troisième condition est remplie.

Bon à savoir : La reconnaissance d’une inaptitude professionnelle ou partiellement professionnelle est importante puisqu’elle permet au salarié d’obtenir une indemnité spéciale de licenciement.

En cas de licenciement pour inaptitude professionnelle ou partiellement professionnelle, le salarié perçoit : 

  • Une indemnité spéciale de licenciement : il s’agit de l’indemnité légale de licenciement doublée, sauf dispositions conventionnelles plus favorables.

Pour rappel, l’indemnité légale de licenciement est calculée de la manière suivante :

  • Un quart de salaire par année d’ancienneté pour les dix premières années

  • Un tiers de salaire par année d’ancienneté après dix ans d’ancienneté

Attention, l’indemnité conventionnelle de licenciement n’a pas à être doublée. Il faut donc comparer l’indemnité légale doublée et l’indemnité conventionnelle pour savoir quelle est la plus favorable à appliquer au salarié.

Il est important de retenir que l’indemnité spéciale de licenciement n’est pas due si l'employeur établit que le refus, par le salarié, de la proposition de reclassement est abusif. En effet, en cas de refus abusif, le salarié perçoit alors l'indemnité légale de licenciement ou l'indemnité conventionnelle si elle est plus favorable.

  • Une indemnité compensatrice de préavis : elle doit être d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis légale.

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