Petit tour d’horizon de l’ordonnance portant mesures d’urgence relatives aux institutions représentatives du personnel.

LES MESURES RELATIVES AUX ELECTIONS PROFESSIONNELLES

1-La suspension du processus électoral et ses conséquences

À la date de publication de cette ordonnance, il est prévu la suspension immédiate de tous les processus électoraux en cours dans les entreprises.

  • La suspension des processus électoraux produit ses effets à compter du 12 Mars 2020.

L’ordonnance cadre une situation particulière : si des formalités relatives au processus électoral ont été réalisées après le 12 Mars 2020, la suspension du processus électoral prend effet à compter de la date la plus tardive à laquelle l’une de ces formations a été réalisée (information du personnel, invitation à négocier le Protocole d’Accord Préélectoral ect.)

Bon à savoir : la suspension du processus électoral se répercute sur l’ensemble des délais en lien avec ce dernier :

  • Les délais impartis à l’employeur (délai pour organiser les élections, délai d’invitation des organisations syndicales, délai de l’engagement du processus électoral sur demande d’un salarié ou d’une organisation syndicale, délai d’organisation d’un second tour ect.)
  • Les délais de saisine de l’autorité administrative
  • Les délais pour saisir le juge en cas de contestation (délai pour saisir le juge en matière de contestation de la régularité des élections)
  • Les délais dont disposent l’autorité administrative pour rendre une décision (le délai de 2 mois commence à courir à la date de la fin de suspension des processus électoraux, soit trois mois après la fin de l’Etat d’urgence sanitaire).

La suspension du processus électoral entre le premier et le deuxième tour, lorsqu’il doit être organisé, ne remet pas en cause la régularité des résultats du premier tour quelle que soit la durée de la suspension.

Le premier tour d’une élection entre le 12 Mars et l’entrée en vigueur de l’ordonnance n’a pas d’incidence sur la régularité du scrutin.

IMPORTANT : Les conditions d’électorat et d’éligibilité s’apprécient à la date de chacun des deux tours du scrutin.

Ainsi, des salariés qui n’étaient pas éligibles avant la suspension du processus électoral pourront l’être à la fin de la suspension.

2-La levée de la suspension du processus électoral

Les employeurs qui devaient engager un processus électoral avant la suspension auront un délai de trois mois à compter de la date de cessation de l’Etat d’urgences sanitaires pour se mettre en conformité avec leurs « obligations électorales » ; c’est-à-dire organiser ou reprendre le processus électoral.

L’état d’urgence sanitaire a été déclaré pour deux mois à partir du 25 Mars 2020. La levée de la suspension serait le 25 Aout 2020 si l’Etat n’est pas prorogé.

L’ordonnance vise expressément :

  • Les employeurs dont l’obligation naît après l’entrée en vigueur de l’ordonnance : si les mandats prennent fin au mois d’Avril, l’employeur doit engager le processus électoral après la levée de la suspension (3 mois après la fin de l’Etat d’urgence sanitaire)
  • Les employeurs qui, bien qu’ayant l’obligation de le faire, n’ont pas engagé le processus électoral avant l’entrée en vigueur de l’Ordonnance.

REMARQUE : Il semblerait que les ministres en profitent pour rappeler aux employeurs que depuis le 1er Janvier 2020 ils ont l’obligation de mettre en place un CSE dès que l’entreprise atteint le seuil de 11 salariés pendant 12 mois consécutifs. Avec la suspension du processus électoral, les employeurs disposent d’un délai supplémentaire qu’ils doivent saisir pour se rapprocher de leur conseiller afin d’établir un rétro-planning électoral et se mettre en conformité.

Le défaut d’organisation des élections professionnelles constitue une faute et un préjudice indemnisable pour les salariés qui se trouvent privés d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts. (Cour de cassation 17 Mai 2011 n°10-12.852)

3-La prorogation des mandats et de leur protection

L’ordonnance offre des garanties importantes concernant le statut et la protection des représentants du personnel dans l’exercice de leurs mandats pendant la période de suspension et de report des processus électoraux.

 

  • Les mandats en cours à la date du 12 Mars 2020 des représentants du personnel, qui n’ont pas été renouvelés, sont prorogés jusqu’à la proclamation des résultats du premier ou, le cas échéant du second tour des élections professionnelles.

 

  • La protection contre les licenciements est maintenue pour les mandats qui ont été prorogés pour toute la durée de la prorogation

 

  • La protection contre les licenciements des candidats aux élections professionnelles est prorogée jusqu’à la proclamation des résultats du premier ou, le cas échéant du second tour des élections lorsque le délai de protection de 6 mois prévu par le Code du travail a expiré avant la date du premier tour.

4-La suspension des élections partielles

L’ordonnance dispense l’employeur d’organiser des élections partielles lorsque la fin de la suspension du processus électoral (mentionnée à l’article 1) intervient moins de 6 mois avant le terme des mandats en cours.

Cette disposition est valable que le processus électoral ait été engagé ou non avant la suspension.

            — En principe : les élections partielles doivent être organisées par l’employeur dès lors qu’un collège électoral d’un comité social et économique n’est plus représenté ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique est réduit de moitié ou plus et si ces événements interviennent moins de six mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du comité social et économique.

L’ordonnance ajoute une nouvelle dispense d’organisation des élections partielles.

 

LES MESURES MESURES RELATIVES A LA CONTINUITE PRATIQUE DU CSE

Les différents moyens offerts aux CSE et à l’employeur pour se « réunir »

L’ordonnance renforce à titre dérogatoire et temporaire la possibilité pour les partenaires sociaux et l’employeur de recourir à la visioconférence pour tenir les réunions du CSE et CSEC.

En principe, le recours à la visioconférence, en l’absence d’accord, est limité à 3 réunions par an. L’ordonnance supprime cette limitation pendant l’état d’urgence sanitaire.

IMPORTANT : Une fois, l’État d’urgence levé, la limitation de 3 réunions par an en visioconférence retrouvera à s’appliquer.

L’ordonnance va encore plus loin et autorise l’organisation de réunions du CSE en conférence téléphonique et messagerie instantanée.

ATTENTION : Le recours à une message instantanée est vraiment dérogatoire et exceptionnel. C’est pour cette raison que l’ordonnance précise que ce dispositif est subsidiaire, et mobilisable uniquement quand l’employeur et les représentants sont dans l’impossibilité d’organiser la réunion du CSE par visioconférence ou conférence téléphonique.

L’ordonnance instaure une hiérarchie entre les modalités d’organisation des réunions du Comité.

  • EN PREMIER LIEU : Visioconférence
  • À DEFAUT : conférence téléphonique
  • À DEFAUT : Messagerie instantanée

L’employeur ayant l’obligation pour chaque modalité d’organisation d’informer au préalable les membres.

La volonté du gouvernement est d’assurer la continuité du fonctionnement des instances et permettre à l’employeur de consulter le CSE tout en respectant la mesure de confinement.

Bon à savoir : Ces dispositions dérogatoires et temporaires sont applicables aux réunions convoquées jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire. Elles sont également applicables à toutes les autres instances représentatives du personnel régies par les dispositions du code du travail.

  • L’ordonnance précise qu’un décret fixera les conditions dans lesquelles l’audioconférence et l’utilisation de la message instantanée se dérouleront.

Régime dérogatoire de consultation du CSE

L’ordonnance modifie l’ordonnance du 25 Mars 2020 et précise que le CSE doit être consulté dans les cas suivants :

  • Décision unilatérale de l’employeur d’imposer ou de modifier les dates des RTT, jours de repos des forfaits jours et CET. (article 2, 3 et 4 de l’ordonnance du 25 Mars 2020)
  • Dérogation aux durées légales du travail (article 6 de l’ordonnance du 25 Mars 2020)
  • Dérogation aux repos dominicaux (article 7 de l’ordonnance du 25 Mars 2020)

L’employeur qui use d’une de ces facultés doit informer le CSE sans délai et par tout moyen.

Le CSE devra rendre son avis dans un délai d’un mois à compter de cette information. Ce qui est regrettable mais en même compréhensible au regard de la situation d’urgence, c’est que l’avis du CSE pourra intervenir après que l’employeur est mise en oeuvre sa décision.

Pour rappel : En principe, une consultation doit obligatoirement être préalable à la prise de décision de l’employeur.

Situation exceptionnelle, règles de consultation exceptionnelles. Il est recommandé au CSE de jouer leur rôle et de rendre un avis même a posteriori afin de montrer aux salariés qu’ils sont présents et actifs en cette période de crise sanitaire.

Bon à savoir : les représentants du personnel sont libres de prendre des heures de délégation pendant l’activité partielle.

Facebook
Twitter
LinkedIn
Marie TIMMONIER

Marie TIMMONIER

Juriste CELIADE